23Juil

Le conflit qui coûte cher… et comment l’éviter

Par Nancy Larose de Solunance.

On le sait tous : les conflits en entreprise peuvent avoir des conséquences majeures sur le climat de travail, la performance et le bien-être de l’équipe. Mais ce qu’on oublie souvent, c’est à quel point il est possible d’intervenir en amont… avant que les tensions ne dégénèrent.

J’ai récemment eu le plaisir de discuter de ce sujet qui me passionne dans l’épisode 65 du balado « Tête-à-tête avec un entrepreneur » de Sandra chez Évolusens.
On y parle de ce que les gestionnaires vivent sur le terrain, des erreurs fréquentes… et surtout, des leviers concrets pour prévenir les conflits.

Dans cet épisode, on aborde :

  • Pourquoi certains conflits explosent… et d’autres non;
  • Quand (et pourquoi) faire appel à un·e médiateur·trice — même si tout n’a pas encore “pété”;
  • Les réflexes qui nuisent à la résolution… et ceux qui apaisent;
  • Des conseils simples et applicables, pour outiller les RH et les gestionnaires.

🎙️ Écouter l’entrevue

Balado : Épisode 65 – Tête-à-tête avec Nancy
Version vidéo sur YouTube : Voir l’épisode ici

Chaque jour où un conflit s’installe silencieusement, c’est un jour où l’équipe tourne moins bien. Si tu veux éviter ça, cette conversation pourrait te donner de précieuses clés.

Tu veux aller plus loin? Je t’invite à télécharger notre outil d’auto-évaluation gratuit, pour faire le point sur la santé relationnelle dans ton organisation : Cliquez ici

Au plaisir de continuer la réflexion avec toi,

Nancy

23Juin

Au-delà des normes : construire un environnement de travail respectueux

Article propulsé par Carrefour RH , écrit par Nancy Larose de Solunance.

De nombreuses entreprises québécoises adoptent des politiques contre le harcèlement en se limitant aux exigences légales minimales. Cependant, elles ne suffisent pas à créer un climat de travail sain. Ces politiques devraient non seulement édicter les interdits, mais surtout souligner les comportements attendus.

Comprendre les obligations légales et les conséquences financières et juridiques

Au Québec, la Loi sur les normes du travail impose aux employeurs d’adopter une politique de prévention du harcèlement psychologique et de traiter les plaintes avec diligence. Cependant, faire le strict minimum, soit simplement rédiger une politique sans l’intégrer efficacement dans la culture de l’organisation, peut ne pas suffire pour que l’employeur respecte pleinement ses obligations.

Les tribunaux s’attendent désormais à ce que les employeurs agissent de manière proactive et efficace, au-delà du simple respect formel des obligations légales. Cette approche plus stricte peut entraîner des conséquences significatives :

Sanctions financières accrues : Les modifications apportées à la CNESST par le projet de loi 42 ont augmenté les sanctions financières. Un employeur qui ne se conforme pas à ses obligations légales peut être passible d’amendes allant de 600 $ à 6 000 $, et, en cas de récidive, de 1 200 $ à 12 000 $.

Dommages et intérêts punitifs : Le Tribunal administratif du travail peut désormais ordonner à un employeur de verser des dommages et intérêts punitifs à un salarié victime de harcèlement psychologique, même si ce dernier est également reconnu comme victime d’une lésion professionnelle résultant de ce harcèlement.

Réintégration et mesures correctives : L’employeur peut être obligé de réintégrer le salarié et de prendre des mesures pour faire cesser le harcèlement, ce qui peut engendrer des coûts supplémentaires.

Coûts indirects : Les situations de harcèlement peuvent entraîner des coûts liés à l’absentéisme, au présentéisme, au renouvellement des effectifs, au recrutement ainsi qu’aux procédures judiciaires et aux indemnisations.

Ces conséquences financières soulignent l’importance pour les employeurs de mettre en place des mesures de prévention adéquates et d’intervenir efficacement au-delà du simple respect formel des obligations légales. Les tribunaux considèrent la « nonchalance, l’indifférence et le manque de prise de mesures » face à une situation de harcèlement comme une contravention à l’obligation de prévention, mais aussi comme une manifestation du harcèlement lui-même.

Importance d’une approche proactive

Les employeurs doivent adopter une approche proactive plutôt que d’adopter une attitude passive en espérant que le temps résoudra les problèmes. Cette approche implique :

  • L’identification des risques pouvant mener au harcèlement;
  • La mise en place et la diffusion d’une politique de prévention du harcèlement;
  • L’intervention rapide et efficace en cas de signalement;
  • De la formation régulière concernant les risques pouvant mener à du harcèlement psychologique.

Le « strict minimum » n’est plus suffisant pour les employeurs québécois. Selon la jurisprudence et les interventions de la CNESST, une politique inefficace ou mal appliquée peut être considérée comme une forme de négligence de la part de l’employeur. Par exemple :

  • Une politique qui n’est pas communiquée correctement aux employés pourrait rendre l’employeur responsable de ne pas avoir prévenu une situation de harcèlement.
  • Un employeur qui n’agit pas avec diligence face à une plainte, même s’il possède une politique en place, pourrait être tenu responsable pour inaction.
  • Une absence de formation et de sensibilisation sur la politique pourrait affaiblir la défense de l’employeur en cas de litige.

Aligner la politique sur les valeurs de l’organisation

Il est important que cette politique de prévention reflète non seulement les obligations légales, mais aussi l’identité et les valeurs fondamentales de l’organisation. Cette approche assure une meilleure adhésion des employés et renforce la culture organisationnelle. Par exemple, une entreprise qui valorise la collaboration et le respect mutuel doit intégrer ces principes dans sa politique en illustrant les comportements attendus. Plutôt que de simplement interdire le harcèlement, elle devrait présenter des exemples concrets de communication constructive et d’attitudes bienveillantes.

Pour renforcer leur efficacité, les employeurs devraient :

  • Assurer une formation régulière pour les employés et gestionnaires afin qu’ils comprennent bien la politique et reconnaissent les comportements à adopter.
  • Intégrer des mécanismes de suivi et d’évaluation de l’application de la politique, comme des sondages internes ou des groupes de discussion.
  • Créer des processus clairs de signalement et d’intervention pour que les employés se sentent en sécurité lorsqu’ils rapportent une situation de harcèlement.

Identifier les lacunes et apporter des solutions simples

Trop souvent, les politiques en place présentent des lacunes importantes qui limitent leur efficacité :

  • Manque de sensibilisation concrète: Les employés reçoivent un document, mais peu d’explications sur la manière d’appliquer la politique au quotidien. Solution : Organiser des ateliers interactifs où des mises en situation illustrent les comportements appropriés.
  • Absence d’exemples concrets: Les règles restent générales et théoriques, ce qui rend leur interprétation floue. Solution : Fournir une de comportements acceptables et inacceptables, adaptée à la réalité du milieu de travail.
  • Mécanisme de signalement trop rigide: Certains employés hésitent à signaler des comportements inappropriés par crainte de représailles. Solution : Mettre en place un système de signalement confidentiel et accessible, avec des options de médiation préventive.

Ces ajustements simples peuvent rendre les politiques plus concrètes, accessibles et efficaces.

Un enjeu crucial dans un contexte multiculturel et intergénérationnel

Les milieux de travail sont de plus en plus diversifiés. Les horizons culturels variés et les différentes générations peuvent entraîner des perceptions divergentes sur ce qui constitue un comportement acceptable. Une politique de prévention bien conçue doit tenir compte de ces réalités et prévoir des initiatives pour sensibiliser et éduquer les employés sur ces différences. En clarifiant les attentes et en présentant des situations concrètes, l’employeur favorise un climat de respect mutuel et réduit les risques de malentendus.

Une responsabilité d’entreprise : avoir une position claire et cohérente

L’engagement de l’employeur ne doit pas se limiter à la rédaction d’une politique. Il doit adopter une position claire, non ambiguë, et veiller à la cohérence de ses actions avec ses déclarations. Une politique qui interdit le harcèlement, mais tolère des comportements irrespectueux au quotidien perd toute crédibilité. L’employeur doit incarner ces principes à travers ses propres actions et les décisions de gestion.

Des mécanismes de résolution de conflits préventifs et réactifs

Enfin, il est essentiel que l’organisation prévoie des mécanismes internes de gestion des conflits capables d’intervenir à la fois en amont et en cas de crise. Un système de médiation interne, une formation en communication bienveillante ou des espaces d’échange ouverts sont des exemples d’outils permettant de prévenir l’escalade des tensions. Une gestion proactive des conflits contribue à désamorcer les situations avant qu’elles ne dégénèrent en harcèlement, assurant ainsi un climat de travail plus serein et plus productif.

Conclusion

Aller au-delà des exigences légales en matière de prévention du harcèlement n’est pas qu’une obligation morale, c’est une stratégie payante pour toute organisation souhaitant favoriser un environnement de travail sain, inclusif et performant. En alignant sa politique sur ses valeurs, en sensibilisant son personnel aux réalités multiculturelles et intergénérationnelles, en identifiant et en corrigeant les lacunes existantes et en mettant en place des mécanismes de prévention et de gestion des conflits, l’employeur joue un rôle clé dans l’épanouissement de son organisation et de ses employés.

23Juin

Les conflits créatifs : quand la friction devient un moteur d’innovation

Article propulsé par  HEC Montreal , écrit par Anne-Marie Tremblay avec la participation de Nancy Larose de Solunance.

Négatifs, les conflits? Pas toujours. Certains peuvent même devenir des catalyseurs d’innovation et de créativité en aidant les organisations à s’améliorer, affirment les experts. Mais pour en faire ressortir le meilleur, encore faut-il savoir les gérer.

Présidente et consultante chez Viaconseil, Caroline Maranda, CRHA, compare la gestion des conflits à un processus d’amélioration continue. «Les deux suivent une logique similaire : un conflit est souvent le symptôme d’un problème plus profond. Pour y remédier, il faut donc bien cerner la cause, documenter la situation et expérimenter différentes approches pour trouver la meilleure solution.»

Un point de vue que partage Jean Poitras, professeur titulaire au Département de gestion des ressources humaines de HEC Montréal. Selon lui, ces désaccords ne surgissent pas par hasard : ils envoient un signal qu’il faut savoir décrypter. «Un conflit cyclique est souvent le symptôme d’un dysfonctionnement organisationnel, donne-t-il en exemple. Prenons une entreprise sans politique claire sur les vacances, si bien qu’il y a des mésententes chaque année entre les employés. Plutôt que de simplement trouver des compromis, on pourrait reculer d’une case et établir une politique claire.»

Le conflit peut aussi être un levier d’évolution, notamment lorsque l’organisation peine à s’adapter au rythme de la société, explique le professeur. Ces tensions deviennent alors un moteur de changement. C’est ce qui s’est produit lorsque les femmes ont revendiqué des conditions de travail plus équitables. «Bien que des iniquités salariales persistent, la situation s’est tout de même améliorée», souligne-t-il.

Transformer les désaccords en occasions favorables

«Quand un conflit trouve sa source dans l’évolution sociale ou l’organisation du travail, son potentiel d’apprentissage est plus grand», estime le spécialiste. Mais même un simple désaccord entre deux personnes peut être une source d’innovation. L’exemple classique? Deux collègues qui ne s’entendent pas sur la façon de travailler : l’un jongle avec plusieurs dossiers à la fois et contacte son collègue à plusieurs reprises chaque jour, tandis que l’autre préfère traiter une tâche après l’autre.

Pour respecter le rythme de chacun, une solution pourrait être la mise en place d’une liste de tâches partagées. L’un pourrait y ajouter des éléments en continu, tandis que l’autre signalerait l’achèvement des dossiers à son propre rythme, suggère-t-il. Ce mode de fonctionnement plus créatif pourrait même inspirer de nouvelles pratiques au sein de l’équipe.

S’il peut être tentant de les balayer sous le tapis, il faut toujours garder en tête que les conflits peuvent être porteurs de changement. «Il est vraiment enrichissant d’écouter ce que les gens ont à dire, car c’est ainsi que naissent des idées créatives. Mais lorsqu’une critique vient d’une personne perçue comme contestataire, ce qui peut être déstabilisant, il est essentiel de se demander si elle soulève un point valide. C’est en creusant qu’on peut détecter un véritable enjeu. Pourtant, ce n’est pas toujours le réflexe naturel dans les organisations», explique Nancy Larose, CRIA, médiatrice accréditée chez Solunance.

Bref, les gestionnaires ont tout intérêt à analyser les causes profondes des conflits : relèvent-ils de l’organisation du travail, de valeurs trop conservatrices ou de traits de personnalité incompatibles? «Si on règle les conflits à la pièce, cela ne favorise pas la créativité, mentionne Jean Poitras. Il faut prendre du recul et cerner les facteurs de prédisposition et les leviers d’action à long terme.»

Encourager le choc des idées

Si les conflits individuels permettent de repenser certaines pratiques, c’est aussi de la confrontation d’idées que surgit la créativité. D’où l’importance de créer un climat où chacun peut s’exprimer librement, sans crainte de faire grimper les tensions. Pour cela, Nancy Larose insiste sur l’importance de bien connaître les membres de son équipe. «Des tests de personnalité aident à comprendre les dynamiques de groupe. Cela fait en sorte qu’il est possible d’utiliser les forces de chacun, d’anticiper les réactions des différents membres de l’équipe et d’être moins dans le jugement.» C’est une façon efficace de désamorcer les tensions.

«Souvent, lorsqu’un désaccord survient, il est perçu comme une attaque personnelle, et le conflit devient vite émotionnel», ajoute Jean Poitras. Pour éviter cette escalade, il suggère d’inviter chacun à exprimer clairement ses points de désaccord et à proposer des idées à contre-courant, comme si c’était un jeu. Discuter en petit groupe permet également de mieux canaliser les échanges et de limiter les risques de dérapage.

De son côté, Justine Carpentier, CRHA, évoque le concept d’«espace courageux», un environnement où les employés peuvent aborder des sujets sensibles sans crainte de représailles. «D’autres utilisent aussi ce qu’on appelle le cercle de réparation», souligne la consultante en ressources humaines chez Viaconseil. Ce concept emprunté à la justice réparatrice permet d’ouvrir le dialogue entre toutes les personnes touchées par les conflits.

Dans tous les cas, le gestionnaire doit donner l’exemple, en pratiquant la communication non violente et en valorisant ceux qui osent soulever des questions inconfortables. De même, il doit adopter une posture d’humilité, et chercher à prévenir les tensions, pense Nancy Larose.

Une culture d’entreprise ouverte aux remises en question

La culture organisationnelle joue un rôle clé dans la gestion des conflits. Selon Caroline Maranda, les organisations moins rigides offrent un terreau plus propice pour transformer les désaccords en occasions constructives. «Quelle que soit la structure, il est essentiel de faire preuve d’ouverture et d’encourager ceux qui osent remettre en question le statu quo et pousser la réflexion plus loin. Il faut aussi accorder le droit à l’erreur», soutient-elle.

Cela exige également un soutien adéquat, ajoute la spécialiste. «Les gestionnaires doivent être disponibles et disposer des ressources nécessaires pour intervenir, car gérer ce genre de situation est non seulement difficile, mais cela demande aussi du temps.» Bien entendu, les conflits menaçant l’intégrité physique ou psychologique nécessitent une approche distincte. Mais pour les autres, ils constituent un levier de progrès, d’apprentissage et d’innovation. «Tout repose cependant sur une réelle volonté de résoudre les différends et une ouverture d’esprit», conclut-elle.

Article propulsé par  HEC Montreal , écrit par Anne-Marie Tremblay en collaboration avec Nancy Larose de Solunance.

Négatifs, les conflits? Pas toujours. Certains peuvent même devenir des catalyseurs d’innovation et de créativité en aidant les organisations à s’améliorer, affirment les experts. Mais pour en faire ressortir le meilleur, encore faut-il savoir les gérer.

Présidente et consultante chez Viaconseil, Caroline Maranda, CRHA, compare la gestion des conflits à un processus d’amélioration continue. «Les deux suivent une logique similaire : un conflit est souvent le symptôme d’un problème plus profond. Pour y remédier, il faut donc bien cerner la cause, documenter la situation et expérimenter différentes approches pour trouver la meilleure solution.»

Un point de vue que partage Jean Poitras, professeur titulaire au Département de gestion des ressources humaines de HEC Montréal. Selon lui, ces désaccords ne surgissent pas par hasard : ils envoient un signal qu’il faut savoir décrypter. «Un conflit cyclique est souvent le symptôme d’un dysfonctionnement organisationnel, donne-t-il en exemple. Prenons une entreprise sans politique claire sur les vacances, si bien qu’il y a des mésententes chaque année entre les employés. Plutôt que de simplement trouver des compromis, on pourrait reculer d’une case et établir une politique claire.»

Le conflit peut aussi être un levier d’évolution, notamment lorsque l’organisation peine à s’adapter au rythme de la société, explique le professeur. Ces tensions deviennent alors un moteur de changement. C’est ce qui s’est produit lorsque les femmes ont revendiqué des conditions de travail plus équitables. «Bien que des iniquités salariales persistent, la situation s’est tout de même améliorée», souligne-t-il.

Transformer les désaccords en occasions favorables

«Quand un conflit trouve sa source dans l’évolution sociale ou l’organisation du travail, son potentiel d’apprentissage est plus grand», estime le spécialiste. Mais même un simple désaccord entre deux personnes peut être une source d’innovation. L’exemple classique? Deux collègues qui ne s’entendent pas sur la façon de travailler : l’un jongle avec plusieurs dossiers à la fois et contacte son collègue à plusieurs reprises chaque jour, tandis que l’autre préfère traiter une tâche après l’autre.

Pour respecter le rythme de chacun, une solution pourrait être la mise en place d’une liste de tâches partagées. L’un pourrait y ajouter des éléments en continu, tandis que l’autre signalerait l’achèvement des dossiers à son propre rythme, suggère-t-il. Ce mode de fonctionnement plus créatif pourrait même inspirer de nouvelles pratiques au sein de l’équipe.

S’il peut être tentant de les balayer sous le tapis, il faut toujours garder en tête que les conflits peuvent être porteurs de changement. «Il est vraiment enrichissant d’écouter ce que les gens ont à dire, car c’est ainsi que naissent des idées créatives. Mais lorsqu’une critique vient d’une personne perçue comme contestataire, ce qui peut être déstabilisant, il est essentiel de se demander si elle soulève un point valide. C’est en creusant qu’on peut détecter un véritable enjeu. Pourtant, ce n’est pas toujours le réflexe naturel dans les organisations», explique Nancy Larose, CRIA, médiatrice accréditée chez Solunance.

Bref, les gestionnaires ont tout intérêt à analyser les causes profondes des conflits : relèvent-ils de l’organisation du travail, de valeurs trop conservatrices ou de traits de personnalité incompatibles? «Si on règle les conflits à la pièce, cela ne favorise pas la créativité, mentionne Jean Poitras. Il faut prendre du recul et cerner les facteurs de prédisposition et les leviers d’action à long terme.»

Encourager le choc des idées

Si les conflits individuels permettent de repenser certaines pratiques, c’est aussi de la confrontation d’idées que surgit la créativité. D’où l’importance de créer un climat où chacun peut s’exprimer librement, sans crainte de faire grimper les tensions. Pour cela, Nancy Larose insiste sur l’importance de bien connaître les membres de son équipe. «Des tests de personnalité aident à comprendre les dynamiques de groupe. Cela fait en sorte qu’il est possible d’utiliser les forces de chacun, d’anticiper les réactions des différents membres de l’équipe et d’être moins dans le jugement.» C’est une façon efficace de désamorcer les tensions.

«Souvent, lorsqu’un désaccord survient, il est perçu comme une attaque personnelle, et le conflit devient vite émotionnel», ajoute Jean Poitras. Pour éviter cette escalade, il suggère d’inviter chacun à exprimer clairement ses points de désaccord et à proposer des idées à contre-courant, comme si c’était un jeu. Discuter en petit groupe permet également de mieux canaliser les échanges et de limiter les risques de dérapage.

De son côté, Justine Carpentier, CRHA, évoque le concept d’«espace courageux», un environnement où les employés peuvent aborder des sujets sensibles sans crainte de représailles. «D’autres utilisent aussi ce qu’on appelle le cercle de réparation», souligne la consultante en ressources humaines chez Viaconseil. Ce concept emprunté à la justice réparatrice permet d’ouvrir le dialogue entre toutes les personnes touchées par les conflits.

Dans tous les cas, le gestionnaire doit donner l’exemple, en pratiquant la communication non violente et en valorisant ceux qui osent soulever des questions inconfortables. De même, il doit adopter une posture d’humilité, et chercher à prévenir les tensions, pense Nancy Larose.

Une culture d’entreprise ouverte aux remises en question

La culture organisationnelle joue un rôle clé dans la gestion des conflits. Selon Caroline Maranda, les organisations moins rigides offrent un terreau plus propice pour transformer les désaccords en occasions constructives. «Quelle que soit la structure, il est essentiel de faire preuve d’ouverture et d’encourager ceux qui osent remettre en question le statu quo et pousser la réflexion plus loin. Il faut aussi accorder le droit à l’erreur», soutient-elle.

Cela exige également un soutien adéquat, ajoute la spécialiste. «Les gestionnaires doivent être disponibles et disposer des ressources nécessaires pour intervenir, car gérer ce genre de situation est non seulement difficile, mais cela demande aussi du temps.» Bien entendu, les conflits menaçant l’intégrité physique ou psychologique nécessitent une approche distincte. Mais pour les autres, ils constituent un levier de progrès, d’apprentissage et d’innovation. «Tout repose cependant sur une réelle volonté de résoudre les différends et une ouverture d’esprit», conclut-elle.

03Sep

La gestion du conflit et la posture du gestionnaire

Vos actions ou inactions, qu’elles découlent d’une maladresse ou d’un inconfort, pourraient aggraver la situation bien malgré vous. Vous devez donc en avoir conscience, observer vos réflexes et déterminer la nécessité de faire appel à un accompagnement externe.

09Mai

Démystifier le rôle de la personne médiatrice et les modes de prévention et de règlement des différends (PRD)

Article propulsé par Carrefour RH , écrit par Nancy Larose de Solunance.

Vous connaissez le terme « médiation ». Vous l’avez probablement rencontré dans d’autres contextes, notamment en droit familial. Mais saviez-vous qu’en ressources humaines, nous y avons également recours? Et bien qu’en règle générale, nous nous attendons à ce que la personne médiatrice trouve la solution ou règle le problème, ce n’est pas le cas. Même qu’elle intervient à peine lors de la médiation. « Mais pourquoi donc mon entreprise devrait-elle y avoir recours, alors? », vous demandez-vous certainement. La réponse est simple : pour déjudiciariser les relations de travail et permettre l’autodétermination des parties impliquées, tout en les responsabilisant l’une et l’autre. Vous l’aurez compris, il existe donc une expertise qui génère l’accord entre deux parties en conflit, qui rapproche deux raisonnements divergents. Démythifions le rôle de la personne médiatrice ainsi que son activité.

Le rôle de la personne médiatrice

Avant de plonger dans le vif du sujet, prenons le temps d’explorer les professions connexes. Ainsi, contrairement au rôle de médiateur, un conciliateur est responsable du règlement amiable d’un différend opposant deux parties. Le facilitateur, quant à lui, voit au bon déroulement du travail basé sur des objectifs bien définis, des méthodes de travail efficaces et la participation des employés. Ces démarches de résolution de conflit ont ceci en commun qu’elles ne constituent pas un processus judiciaire, comme c’est le cas, par exemple, d’un procès ou d’un arbitrage où une tierce personne (ou un groupe de personnes) décide alors de l’issue du conflit.

Ainsi, le rôle de la personne médiatrice, une intervenante indépendante neutre, se déroule en deux temps distincts. Premièrement, elle doit définir le cadre du processus de médiation, encadré d’une entente de confidentialité, ainsi que les règles qui le régissent au moyen d’un protocole de médiation. Le sceau du secret est d’ailleurs essentiel au bon fonctionnement de la démarche, et les obligations qui s’y rapportent doivent être bien comprises, autant des participants que de la personne médiatrice.

La confidentialité sert d’ailleurs d’appui à la relation de confiance entre la personne médiatrice et les participants. Elle fait en sorte que chacune des parties impliquées accepte, sur une base libre et volontaire, de participer à la démarche. De plus, il doit être clairement établi que les personnes impliquées sont de bonne foi et expriment une réelle volonté de régler la situation.

Bien qu’administratif, cet aspect du travail de médiation est indispensable à une démarche concluante.Si l’objectif ultime est de redonner du pouvoir aux parties impliquées, elles ne doivent pas ignorer que, dès le départ, le succès de toute la procédure ne dépend que d’elles, et ce, du début à la fin. Dans cette optique, en aucun temps la personne médiatrice ne peut forcer ni obliger qui que ce soit à quoi que ce soit. Cependant, elle doit s’assurer que toutes les personnes sont à l’aise avec le cadre de la médiation et qu’elles se sentent en confiance pour aller de l’avant.

Ensuite vient la seconde partie de son rôle : la préparation. Dans le but d’établir un fil de discussion entre deux personnes dont la communication est difficile au point de ne plus se comprendre et parfois de s’ignorer, il doit y avoir une préparation qui les amènera à faire un minimum d’introspection. En effet, les sujets doivent prendre eux-mêmes conscience du désaccord.Lors de rencontres individuelles avec les deux parties, la personne médiatrice écoutera sans jugement, reconnaîtra les émotions et permettra aux personnes de s’exprimer librement et complètement. Elle confirmera sa compréhension en reflétant de temps en temps les propos énoncés, tandis qu’à d’autres moments, elle utilisera le recadrage des perceptions pour mettre en évidence d’autres impressions.

L’écoute active apaisera également l’interlocuteur tout en le plaçant dans une posture d’écoute réceptive, de façon à ce qu’il puisse comprendre les notions suivantes :

  • L’explication de l’escalade du conflit qui donne aux participants l’occasion de se situer et de comprendre comment ils en sont arrivés à ce point.
  • La communication constructive (non violente) qui permet d’adopter une approche de communication non accusatrice pour exprimer ses besoins.
  • Les perceptions et les perspectives possibles des différents éléments qui composent les filtres de nos jugements.

À la suite de quoi, les participants sont en mesure d’identifier la cause initiale du conflit et ses sources originelles. Finalement, la démarche de médiation sera basée sur un objectif commun, déterminé par l’ensemble des parties.

Selon les situations et les personnes, il peut y avoir plusieurs rencontres préparatoires. Ensuite, selon l’approche utilisée, une simulation de médiation permettra aux participants de se projeter dans une discussion face à face. Il ne faut pas oublier que ce type de conversation peut être inconfortable pour les participants et les amène à exposer une certaine vulnérabilité.

Les modes de prévention et de règlement des différends (PRD) : une garantie de moyens et non de résultat

Fait essentiel : la médiation est une garantie de moyens et non de résultat. La différence est importante, puisque l’issue ne dépend que des participants. Les mécanismes de PRD sont donc des moyens alternatifs aux procédures judiciaires et sont prévus au Code de procédure civile[1].

La contraignabilité renvoie à une décision juridique obligeant une personne à accomplir un acte quelconque par voie d’autorité, telle que divulguer les propos échangés lors d’une rencontre. A contrario, toute personne médiatrice est liée par un acte de non-contraignabilité et ne peut, à aucun moment, dévoiler quelconque détail des rencontres et de la médiation, sauf si elle a l’autorisation des deux parties.

Parallèlement, les personnes participantes pourront recevoir une attestation de médiation qui, advenant une démarche judiciaire, permettra d’être priorisée. Cette mesure est prévue, notamment, pour susciter la communication, prévenir les conflits, déjudiciariser les processus et redonner du pouvoir aux parties.

Types de médiation

Comme mentionné d’entrée de jeu, il existe plusieurs types de médiation. À noter que cette liste ne comprend pas les médiations de justice réparatrice qui, par définition, encourage les contrevenants à assumer les conséquences de leurs gestes pour réparer les torts ou dommages résultant d’un crime. Également, tout différend peut être réglé par un processus de médiation. Par exemple, la Division des petites créances de la Cour du Québec offre trois heures de médiation gratuite pour régler un conflit en cause.

  • Habituellement réalisée par des avocats, la médiation familiale est une négociation raisonnée qui permet de développer et d’approfondir les besoins de chacune des parties (enfants et parents), d’analyser les options de règlement possibles et de choisir la solution la plus satisfaisante pour la protection et l’intérêt de tous les membres de la famille. Elle ne représente pas une instance pour les parties. De plus, la confidentialité et le contenu sont non admissibles en cour.
  • La médiation citoyenne s’adresse aux personnes en conflit avec d’autres personnes ou avec des institutions de leur communauté. Elle peut être utilisée dans divers contextes : désaccords entre voisins (limites de terrain, dépôt de la neige, animaux, bruit, etc.), discordes interpersonnelles au sein du réseau amical, professionnel ou familial (à l’exception du processus de séparation ou de divorce et la garde des enfants) ou encore, conflits entre un ou plusieurs citoyens et des instances ou des organismes privés ou publics de la communauté. La médiation citoyenne est gratuite. Les organismes de justice alternative du Québec peuvent d’ailleurs vous orienter vers des personnes médiatrices citoyennes bénévoles.
  • Dans le cadre d’une médiation en relation de travail entre un employeur et un syndicat, on utilise la conciliation, un moyen neutre et confidentiel, pour trouver une entente satisfaisante entre les deux parties dans le cas d’une mésentente. Tenu par un conciliateur impartial, le processus de conciliation s’apparente à la médiation, à la différence que le professionnel est souvent un représentant de la justice ou de l’administration publique. Selon les circonstances, il peut être désigné par les parties, un représentant de l’État ou un juge.
  • Les relations de travail entre employés et gestionnaires représentent la véritable expertise de l’auteure de ces lignes. Cette médiation est basée sur l’approche relationnelle et permet aux parties de trouver la meilleure avenue pour maintenir la relation professionnelle. On peut y recourir à la suite d’une plainte de harcèlement psychologique ou préalablement, peu importe le contexte, et ce, afin de prévenir une dégradation du climat de travail.

En conclusion, la médiation est une option intéressante pour les milieux de travail. En effet, elle s’avère en particulier être moins longue et coûteuse qu’une démarche judiciaire pour laquelle il peut s’écouler facilement jusqu’à 24 mois avant même que l’affaire soit entendue. La médiation permet de conclure définitivement une mésentente entre deux parties et offre, par le fait même, un sentiment de justice réparateur et un moyen efficace de renouer avec l’environnement de travail.